La philosophe Judith Butler base
toute sa réflexion sur le genre, sa place dans la société et tout ce qui
gravite autour et réfléchit à la place des normes (on ne devrait pas justifier
de notre place dans la société par notre sexualité). Ainsi, elle explique que
chaque personne est définie selon le genre alors que ça ne devrait pas être le
cas. Pourquoi se définir comme gay ou transsexuel(le) avant d’être homme ou
femme ? On juge souvent comme cela les personnes homosexuelles mais on ne
rattache pas les personnes hétérosexuelles à cela. On est bien trop souvent
identifiés par rapport à cela, aux relations que l’on entretient. Ainsi, on
sait tous que la question de l’homosexualité divise. Si un individu est défini
par ses qualités et ses caractéristiques, une personne gay sera (dans la
majorité des cas) uniquement perçue de ce point de vue là. Comme elle
l’explicite, le genre appartient au champ des ambivalences et on dénombre de
nombreuses oppositions. Le genre divise et beaucoup de questions de société
gravitent autour de ce sujet et de cette question, et ce notamment dans
l’actualité.
On peut ensuite aboutir à un sujet essentiel :
le mariage gay. Judith Butler fait d’abord une contextualisation du mariage.
Depuis un certain nombre d’années, on a pu observer un changement du mariage et
notamment un abandon progressif des méthodes et rites traditionnels. En
revanche, ce désir de changement et de modernité apparaît beaucoup plus chez
les couples hétérosexuels qu’homosexuels. Elle problématise alors le sujet et
se demande si le mariage change parce que les gays se marient ou est ce que le
mariage change les gays. C’est une question à laquelle il est difficile de
répondre car on ne peut pas l’évaluer. La conclusion à en retirer reste que les
homosexuels ont eux aussi le droit au mariage puisqu’en définition le mariage
est fait pour sceller une union entre deux personnes ayant des sentiments
amoureux l’un pour l’autre (Judith Butler se questionne au passage pour savoir
pourquoi il est nécessaire de se marier à deux, qu’est-ce qui impose les
limites de nombre ?). Le mariage est en définitive une signature qui
permet à deux conjoints de vivre leur sexualité et leur parenté pleinement en
étant lié, de mettre en commun des biens.
Les relations que l’on a avec
autrui nous aident dans notre construction de soi mais peuvent aussi bien avoir
des effets positifs que néfastes. Assumer sa sexualité différente permet à
beaucoup de personnes de la sphère publique de porter des jugements trop hâtifs
et ainsi de créer des malaises. Parfois, il est très difficile d’assumer ses
choix, surtout à l’âge de l’adolescence où la construction de soi et
l’émancipation sont les plus fortes. Judith Butler exprime cette idée nettement
en repensant à sa vie plusieurs années auparavant. Lorsqu’elle commence à avoir
des relations très proches avec des jeunes filles à l’âge de quatorze ans et à
réaliser qu’elle éprouve une forte attirance envers ces dernières, il lui devient
difficile de se percevoir comme normale. Comme elle en témoigne, le terme
d’homosexualité faisait avant référence au domaine du médical, comme à un
diagnostic apposé par un médecin. A noter que ce n’est que le 17 mai 1990 que
l’Organisation Mondiale de la Santé a retiré l’homosexualité de la liste des
maladies mentales. En hommage à cette
journée, la journée internationale contre l’homophobie a lieu le 17 mai. Ce
fait révèle un état d’esprit fermé des mentalités actuelles et même de la part
d’organismes internationaux comme l’OMS. Quand au terme de lesbienne (terme qui
la définit mais qu’elle avait, semble-t-il, des difficultés à assurer dans un
premier temps), il n’existait pas et cela faisait d’autant plus ressortir une
différence. Beaucoup de personnes ont eu (et ont encore) des difficultés à
assumer leur sexualité et on assiste de plus en plus à des changements radicaux
des modes de vie. Ainsi, il devient relativement courant de voir des couples hétérosexuels
mariés ayant des enfants, divorcer puisque l’un des deux parents assume sa
sexualité. Pour revenir au mot « lesbienne », à son sens et à son
apparition, on peut noter que cela a créé une stigmatisation sociale qui
entraine un sentiment de peur et une condamnation à l’exclusion sociale.
En effet, lorsque le phénomène s’est
officialisé et que beaucoup de personnes gays ont assumé leur différence, il y
a eu beaucoup de rejets de la société et encore aujourd’hui, les insultes,
menaces et agressions proférées aux personnes gays sont fréquentes. D’après un
article publié dans Le Monde et les rapports tenus par l’association SOS
homophobie, il y aurait une agression tous les deux jours d’une personne gay.
Ce phénomène de l’homophobie est très présent en France (et dans d’autres pays)
et sous diverses formes. Beaucoup d’adolescents sont rejetés à cause de leur
différence, surtout au lycée même si certains sont épaulés par leurs camarades,
et on en vient même à observer des violences prodiguées par les parents (les
pères en général) lors de l’annonce de l’homosexualité de leur enfant. Pourquoi
un tel rejet ? Les personnes homophobes le sont souvent parce que l’homosexualité
ne rentre pas dans l’ordre naturel des choses. Un couple c’est un homme et une
femme qui ont des enfants. Pourtant, il faut en convenir, une personne
homosexuelle n’est en aucun cas différente de quelqu’un d’hétérosexuel. Il n’en
est pas moins intelligent, dénué de qualités et uniquement constitué de
défauts. Ces personnes vivent de la même manière et c’est ce que cherche à
démontrer Judith Butler.
Judith Butler, en répondant à la
question d’un journaliste, pose des questions sur la conférence annuelle Queer, ayant lieu l’année de l’interview
à Tel Aviv en Israël. L’interrogation qui subsiste est de savoir comment peut
se réaliser cet évènement qui pose les questions de droits des minorités
sexuelles et du choix des partenaires sexuels dans cette société où la
répression est forte et où les droits sont limités. On peut facilement imaginer
la difficulté des personnes gays de le revendiquer en Israël même si la
conférence prendra la défense de ces personnes là. En effet, la conférence
n’est pas éternelle et on peut songer aux répercussions et à
« l’après » pour la vie de tous les jours des personnes
homosexuelles.
En France, le mariage gay a été
légalisé depuis peu. Avant, les homosexuels (comme les hétérosexuels) pouvaient
accéder au PACS (Pacte Civil de Solidarité) qui ne permet pas l’adoption
d’enfants. Le 17 mai 2013, le Président de la République François Hollande rend
publique la décision autorisant le mariage entre personnes du même sexe (à
l’occasion de la journée mondiale de lutte contre l’homophobie) même si la loi
est adoptée le 23 avril 2013. On peut noter tout de même un
« retard » des mentalités puisque le premier pays à avoir légalisé le
mariage gay est les Pays Bas en 2001. Par ailleurs, les couples homosexuels
n’ont toujours obtenu le droit d’adoption qui leur confèrerait une place
égalitaire à tous les autres citoyens français, contrairement à d’autres pays
comme les Pays Bas là encore ou bien le Canada. Pour avoir un chiffre, on
dénotait plus de 10 000 mariages homosexuels en 2014, ce qui prouve que la
loi était tant attendue et à une réelle utilité et nécessité.
Néanmoins, et ce malgré les
progrès réalisés et l’ouverture d’esprit des citoyens, on retrouve encore des
homophobes tenant des propos qui ne semblent pas relever d’une mentalité
moderne. Beaucoup d’insultes fusent à l’égard des homosexuels mais on dénombre
aussi beaucoup d’agressions physiques beaucoup plus graves. Plusieurs témoignages
en attestent : une jeune fille jetée par-dessus une rambarde d’escaliers
par ses camarades (14 ans) de peur d’être contaminés ou encore une autre dont
le père lui a cassé le bras. Les réactions sont très violentes et on en vient à
se demander pour quelle raison est-ce qu’on est réellement considérés.
L’entourage réagit de manière semble-t-il exagérée alors que les proches
(famille et amis) devraient être les premiers à soutenir les personnes se
révélant homosexuelles et surtout s’assumant. Par ailleurs, les menaces
proférées se font souvent via les réseaux sociaux et depuis l’avènement
d’internet, ce qui a des conséquences dramatiques sur les personnes concernées.
Aujourd’hui,
de multiples associations se sont mises en place pour lutter contre
l’homophobie et défendre les intérêts des personnes homosexuelles. On retrouve
d’abord l’association SOS Homophobie (Association nationale de lutte contre la
lesbophobie, la gayphobie, la biphobie et la transphobie), créée le 11 avril
1994 et basée à Paris mais ayant mis à dispositions des points d’accueil dans
différentes grandes villes de France. Leur but est de lutte contre l’homophobie
et le rejet des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transsexuelles en
passant essentiellement par de la prévention. Elle a aussi mis en place une
ligne d’écoute pour que victimes comme témoins puissent témoigner et avoir une
oreille attentive à leur écoute ainsi que des renseignements. Il convient aussi
de réaliser des interventions auprès des enfants à l’école pour qu’ils se
libèrent des stéréotypes entendus et puissent se faire leurs propres idées
(comprendre la différence et l’accepter). Pourquoi seraient-ils forcés de subir
les paroles de leur entourage, avec lesquelles ils n’adhèreraient pas forcément
s’ils pouvaient se faire leur propre avis ? Leur autre action majeure est
de mener des enquêtes et des sondages pour les analyser et en tirer des
conclusions sur la présence de l’homophobie dans notre société (rapport annuel
sur l’homophobie, guide pratique contre l’homophobie, enquête sur la
lesbophobie). On voit aussi apparaître le mouvement de la Gay Pride, qui tire
son origine des Etats-Unis dans les années 1970 et qui devient un mouvement
d’ampleur internationale qui vise à manifester pour les droits des homosexuels,
pour qu’ils puissent vivre de la même manière que tout hétérosexuel. On
retrouve enfin la fédération LGBT (lesbienne, gay, bisexuel et transsexuel) qui
est une association dont le but est là aussi de fédérer des acteurs dans le but
de les rallier à la cause homosexuelle. Il s’agit aussi de rassurer les
homosexuels et de les aider à s’affirmer et surtout à s’assumer.
Julie CARRIERE
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